Améliorer l’accès à l’avortement pour les femmes sans-papiers !
Journée mondiale du droit à l’avortement :
le parcours du combattant pour les femmes sans-papiers
A l’occasion de la journée mondiale du droit à l’avortement, le mercredi 28 septembre, Médecins du Monde publie un rapport qui décrit les obstacles auxquels les femmes sans-papiers sont confrontées lorsqu’elles souhaitent recourir à une interruption volontaire de grossesse (IVG). Médecins du Monde adresse notamment des recommandations, en collaboration avec une cinquantaine d’organisations, dont La Fédération Laïque des Centres de Planning Familial, le CHU Saint-Pierre et la Fédération des Associations des Médecins Généralistes de Bruxelles.
Entre 4 à 9 semaines d’attente administrative pour une demande d’avortement
En Belgique, les filles et femmes qui n’ont pas accès aux soins de santé doivent entamer une procédure afin de bénéficier de l’Aide Médicale Urgente (AMU), une intervention financière du CPAS dans les frais médicaux d’une personne en séjour précaire en Belgique. Elles doivent parfois entrer en contact avec 6 à 8 prestataires de soins, obtenir une dizaine de rendez-vous et attendre 9 semaines avant d’avoir accès à une IVG prise en charge par le CPAS.
Cette procédure qui conditionne l’accès aux soins de santé pour les personnes sans-papiers manque de clarté, comprend des contradictions et de nombreux obstacles. De plus, les délais imposés concernant l’IVG étant très courts (avant la fin de la 12e semaine de grossesse), les femmes et les prestataires doivent donc entreprendre une véritable course contre la montre afin de mettre un terme à la grossesse dans le délai légal.
Cette lourdeur administrative est renforcée par le fait que tous les CPAS n’interprètent pas la procédure de la même manière, ce qui complique l’accès à l’avortement dans certaines communes. De plus, de nombreux CPAS collaborent avec un nombre limité de centres de planning familial: « Prenons l’exemple d’une commune où il y aurait 5 centres de planning familial pratiquant l’IVG, mais que le CPAS de cette commune n’est conventionné que avec deux d’entre eux. Si ces deux centres conventionnés n’ont pas de disponibilité et qu’une femme doit donc se rendre dans un autre centre de planning familial, elle va devoir entamer une procédure administrative supplémentaire dans son CPAS afin d’avoir accès à une IVG dans cet autre centre», explique Céline Glorie, référente santé et droits sexuels et reproductifs pour Médecins du Monde. Cette procédure supplémentaire peut encore prendre 30 jours.
« De nombreuses femmes, le personnel de santé ainsi que les centres pratiquant l’IVG sont dépendants de la réponse du CPAS, ce qui engendre une série de dilemmes moraux et financiers inacceptables : les prestataires de soins doivent-ils prendre à leur charge les soins de santé ? Ou bien faut-il demander aux patientes d’avancer les frais ou de les payer ? », commente Sarah Melsens, chargée de plaidoyer pour Médecins du Monde.
Manque de connaissances de la part des travailleurs.euses sociaux
De plus, au fil des entretiens et des études de cas, il est apparu que des travailleur.euses sociaux manquaient de connaissances relatives à l’IVG et à l’AMU, et ne faisaient pas toujours preuve de neutralité: « Il arrive, par exemple, que des femmes soient encouragées à ne pas avorter par certains membres du personnel, en fonction de leurs propres valeurs morales. Ce n’est pas acceptable dans un pays comme la Belgique, qui défend fermement les droits des femmes. D’autant plus qu’il est fréquent que les femmes concernées aient subi des violences sexuelles», ajoute Céline Glorie. « L’accès à l’IVG sécurisé et pris en charge est donc compliqué pour les femmes sans-papiers en Belgique, et cette situation n’est pas acceptable », conclut Sarah Melsens.
Médecins du Monde et les organisations partenaires adressent donc des recommandations politiques urgentes :
- Simplifier et harmoniser la procédure administrative afin de permettre aux patientes d’avoir un accès effectif à l’interruption de grossesse volontaire, en assurant notamment :
- une prise en charge immédiate et temporaire (‘carte temporaire’) durant l’attente de la réponse du CPAS
- Une procédure administrative accélérée et simplifiée
- Garantir le libre choix du prestataire de soins de santé (comme c’est le cas pour les personnes de nationalité belge)
- Informer, former et sensibiliser les travailleur.euses de première ligne, sur l’accès aux soins pour les personnes précarisées et à l’avortement
- Etendre le délai légal de l’avortement en Belgique de 12 semaines à 18 semaines
- Supprimer le délai de réflexion obligatoire de 6 jours